Droit de l'enfant - le délégué général

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Kenza, le frère dont j'ai peur d'oublier le visage

Kenza a 7 ans quand Sabri quitte le domicile familial pour rejoindre la Syrie. Quatre années plus tard, elle nous raconte son frère. Au départ de son récit partiel récolté au sein d’un groupe d’implication et de recherche en sociologie clinique destiné aux fratries, de ses souvenirs et de nos échanges, son histoire reconstruite témoigne de sa percepti on et de l’impact de ce passé toujours bien présent.

Chaque fois qu’il pouvait, il téléphonait mais ce n’était pas facile. Il n’avait pas d’argent. Un jour j’ai refusé de lui parler, j’étais fâchée, parce qu’il dit qu’il est parti aider des familles mais il a cassé la nôtre. Quand maman lui a dit, il a répondu: "Je ne te quitte pas maman, je vais nous gagner une place au paradis". Il était doux au téléphone mais par Messenger, c’était parfois différent, il était dur, il disait qu’il n’avait aucune utilité ici, que la Belgique n’était plus pour lui, qu’il avait trouvé un sens à sa vie.

Le jour où j’ai appris que Sabri était mort, j’ai dit à ma tante : "J’ai perdu mon frère mais je crois que j’ai perdu mes parents aussi". Mais j'ai pas pleuré, j’ai continué à jouer. J’étais triste mais y’avait rien qui sortait et je dessinais des filles,des fleurs, ça me calme. 

Le témoignage de Kenza brise le silence, desserre l’étau du secret qui protège les fratries concernées par le départ d’un des leurs. Du haut de ses 11 ans, elle livre avec pudeur et délicatesse ses angoisses, sa colère et ses joies. Elle autorise une parole tue par peur du jugement. Mais surtout, elle revendique son désir et son droit d’être une enfant.

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