Droit de l'enfant - le délégué général

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Le Délégué général aux droits de l’enfant réagit aux propos de Madame Anne François dans le journal « Le Soir » de ce mardi 15 mars 2011

17.03.2011 11:34 Il y a : 13 yrs

Le Délégué général aux droits de l’enfant réagit aux propos de Madame Anne François dans le journal « Le Soir » de ce mardi 15 mars 2011


A l’heure où de nombreux peuples du Sud de la Meditterrannée demandent, avec courage et légitimé, que soit mis fin aux privilèges de classe dans leurs pays dans un mouvement en faveur de la démocratie, certains, en Communauté française de Belgique, semblent trouver des raisons d’abandonner l’espoir de construire une société basée sur les valeurs d’égalité, de tolérance et de fraternité. Les propos de la coordonnatrice de l’ASBL ELEVeS rapportés dans une interview au quotidien Le Soir de ce mardi 15 mars à propos de du décret inscription (en première année du secondaire) ne peuvent que susciter l’indignation et la réprobation de ceux qui n’ont pas perdu tout contact avec les réalités plurielles du monde d’aujourd’hui et le sens du partage.

Madame François affirme que « le décret du gouvernement pénalise les parents qui avaient un projet de scolarité pour leur enfant au profit d’autres parents qui en avaient peut-être moins ». Cette simple phrase décrète, sans la questionner, la dualisation de fait de notre société. Elle constitue un jugement, sans appel, qui condamne certains de nos contemporains à devoir se satisfaire d’un sous-statut de citoyen dicté par leurs conditions de vie socio-économiques ou leurs origines culturelles qui, de plus, les dépouille de leurs compétences parentales.

De la discrimination pure et simple qui, lorsqu’Anne François déclare que « les droits des parents ont été bafoués », bafoue à son tour les droits des enfants cette fois, tels qu’ils figurent dans la Convention internationale de 1989 à l’article 28 (« droit de l’enfant à l’éducation et, en particulier, en vue d’assurer l’exercice de ce droit progressivement et sur la base de l’égalité des chances » mais aussi pour « les Etats de rendre ouvertes et accessibles à tout enfant l’information et l’orientation scolaires et professionnelles »), et à l’article 29 (l’éducation de l’enfant doit viser notamment à préparer l’enfant à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre, dans un esprit de compréhension, de (…) tolérance, d’égalité) entre autres.

Madame François ne mesure sans doute pas la légèreté de ses propos lorsqu’elle poursuit en affirmant que d’« envoyer un enfant noir dans une école de blancs, comme l’inverse, peut être vécu comme un traumatisme. » Ce discours, qui renvoie à une époque que l’on croyait révolue depuis la fin de l’Apartheid en Afrique du Sud, doit pousser tous les défenseurs d’une société pluraliste, fondée sur le respect de l’autre et l’éducation à la différence, à la diversité, à rappeler leur attachement à une école pour tous.

Chaque parent, qu’il soit riche ou pauvre, qu’il soit noir ou blanc, quoi qu’en dise ou en pense Madame François, aspire à permettre à ses enfants de vivre mieux que lui-même. Or, en 2011 en Communauté française, on sait que le système scolaire ne permet plus partout et tout le temps à nos élèves de gravir l’échelle sociale. C’est cette injustice que le décret inscription tente de corriger. Et même s’il ne peut seul résoudre tous les problèmes de l’école, son objectif est noble et répond au besoin crucial d’une action politique déterminée pour éviter que soient piétinés les droits des enfants les plus fragiles, les moins favorisés.

Il y a aujourd’hui moins d’injustice dans les inscriptions scolaires en première année du secondaire qu’il n’y en avait avant la mise en œuvre des différents décrets en cette matière. Mais celles et ceux qui y résistent encore sont beaucoup plus actifs et armés médiatiquement que ne l’étaient, auparavant, les parents des enfants laissés pour compte. Quitte à user de l’outrance pour faire passer leur message.