Droit de l'enfant - le délégué général

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Le Délégué général aux droits de l'enfant exprime son soutien déterminé au petit frère et aux parents de Mawda ainsi que sa consternation face à l'enchaînement des événements depuis son décès en Belgique.

23.05.2018 10:31 Il y a : 6 yrs

Le Délégué général aux droits de l'enfant exprime son soutien déterminé au petit frère et aux parents de Mawda ainsi que sa consternation face à l'enchaînement des événements depuis son décès en Belgique.


Tout le monde connait désormais le drame qui s’est joué sur un parking de la région montoise : une petite fille tuée d’une balle dans la tête et des proches éplorés, inconsolables. Derrière eux, c’est tout un pays, ou presque, qui est bouleversé par le décès de cette enfant victime de l'exil forcé de sa famille, des politiques migratoires détestables et de l’emballement sécuritaire à l’égard des migrants.  Parce qu’il s’agit d’une vie, trop courte, brisée dans des circonstances d'une violence inouïe. Mais aussi parce que cette mort nous rappelle le sort peu enviable de celles et ceux qui cherchent refuge à des milliers de kilomètres de chez eux pour fuir la guerre, la violence ou des conditions de vie indignes de notre siècle. Le Délégué général exprime son immense peine, son soutien déterminé aux parents de la victime et sa consternation face à l'enchaînement des événements qui a conduit et suivi le décès de Mawda.

Il appartient désormais au Parlement de faire fonctionner pleinement la démocratie et de veiller à faire émerger toute la vérité sur ce tragique événement,  comme s’y est engagé le Premier ministre, Charles Michel. Mais on sait aujourd’hui qu’il faudra également faire la lumière sur les suites du drame et la manière dont ont été traités les proches de la petite victime. On a ainsi découvert, lors de la conférence de presse organisée ce lundi, le traitement indigne qui a été réservé aux parents et au petit frère de Mawda. Alors qu’elle tentait de soigner son enfant encore vivante et qu’elle l’avait veillée, durant de longues minutes, avant l’arrivée de l’ambulance, la mère n’a pas  été autorisée à accompagner sa petite fille à l’hôpital. Sous le choc, elle a été emmenée, menottée, avec son fils de quatre ans, vers le commissariat de police de Mons où les deux, mère et fils, séparés du père, ont été détenus en cellule durant plus de 24 heures. A l’heure où l’ensemble des institutions et des associations de défense des droits de l’enfant,  dans la foulée de l'annonce par le gouvernement de l’ouverture prochaine d'un centre fermé pour familles "migrantes", unissent leurs voix pour dénoncer les conséquences dévastatrices, scientifiquement prouvées, de la détention de mineurs d’âge sur leur bien-être et leur développement, cette privation de liberté du frère de Mawda est  proprement ahurissante.

Plus grave : elle est contraire à l’esprit et à la lettre de la Convention internationale des droits de l'enfant qui, outre son article 22 qui garantit au mineur réfugié le bénéfice de la protection humanitaire, convient en son article 37 que  l’arrestation, la détention ou l’emprisonnement d’un enfant « ne peut être qu’une mesure de dernier ressort, et être d’une durée aussi brève que possible ». Ce même article assure aussi que «  tout enfant privé de liberté sera traité avec humanité et avec le respect dû à la dignité de la personne humaine, et d’une manière tenant compte des besoins des personnes de son âge ». Comment comprendre, dès lors, qu’aucune aide psychologique adaptée ne lui ait été proposée depuis le décès tragique de sa petite sœur? Comment expliquer, alors qu’elle  est automatiquement proposée aux victimes des plus petits dommages, que cette assistance n’ait pas été proposée à cette famille profondément meurtrie ? Doit-on considérer que les autorités ont pu estimer que le statut administratif des personnes concernées  primait sur la simple humanité et sur la loi ? Nous refusons d'envisager cette éventualité qui témoignerait d'un cynisme inacceptable devant une détresse humaine incommensurable.

L'urgence réclame désormais que l'on s'occupe avec toute l'attention requise des survivants de ce terrible drame. Le Délégué général demande avec insistance que tout soit mis en œuvre pour accompagner le frère de Mawda et sa famille dans leur deuil. Il n’est pas acceptable d'imaginer qu'ils soient expulsés du territoire après l’inhumation de la petite fille comme annoncé durant le week-end. Notre pays doit à cette famille l'autorisation de séjourner légalement sur notre territoire où reposera désormais cette enfant décédée. C'est une question d'éthique, c'est une question d'humanité.

Par ailleurs, une assistance psychologique doit rapidement être mise en place au bénéfice du frère de Mawda, de ses parents et de toute personne témoin du tragique événement. Le Délégué général se met à la disposition des autorités pour faciliter ce travail dans le cadre de ses missions. Son institution a déjà pris des contacts afin de faciliter cette démarche.

Il restera particulièrement attentif à l’évolution de cette situation. Comme il est et reste attentif à la situation inquiétante de nombreux enfants que l'exil dépouille injustement de leurs droits et expose à des violences épouvantables. Aussi dans notre pays.

Bernard De Vos