La Convention internationale relative aux droits de l’enfant engage l’Etat à garantir à l’enfant ses droits indivisibles et égaux selon quatre piliers fondamentaux : le droit à la vie et à son développement, la non-discrimination, son intérêt supérieur et enfin, le respect de son opinion. La Convention nous rappelle que ce sont bien les adultes qui sont responsables des enfants, que l’on soit parents, familiers, professionnels, parlementaires ou mandataires exécutifs. La vulnérabilité inhérente au statut de l’enfant doit nous maintenir éveillés sur cette indispensable protection à mobiliser tous ensemble.
La lutte contre le terrorisme, le radicalisme et l’extrémisme violent est nécessaire dans une société démocratique telle que la nôtre. L’Etat doit garantir les libertés individuelles tout en garantissant à ses citoyens la nécessaire protection face à la commission d’actes violents susceptibles d’intenter à leur intégrité physique. Nul n’est question de remettre en cause les buts légitimes poursuivis par les politiques de sécurité. Cependant, cela implique d’opérer en permanence une juste balance des intérêts en jeu et de toujours respecter le critère raisonnable de proportionnalité.
Mais plus que jamais le champ du social est invité à intégrer en profondeur de nouvelles ramifications avec le champ sécuritaire dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Sans surprise, cette lutte suit ce qui est initié depuis le début des années 90 et qui a graduellement inscrit la logique sécuritaire dans la politique sociale dans un contexte d’individualisation grandissante des problèmes sociaux.
Parce que ces dispositifs de lutte contre la radicalisation mettent une réelle pression sur les professionnels du secteur social, il est important d’entendre les voix qui s’y opposent. En 2019, un recours a été déposé à la Cour constitutionnelle contre la loi CSIL-R par des associations de défense des droits humains et des droits de l’enfant. Si ce recours a été jugé non-fondé, il éclairait pourtant le fait que les professionnels ont les moyens d’accompagner les personnalités les plus en marge de notre société, grâce au respect du secret professionnel. La création des Cellules de sécurité intégrale locales, suite à l’introduction de l’article 458ter dans le Code pénal vient à nouveau éroder ce principe fondamental. Ce sera la troisième fois sur ces 30 dernières années après la lutte contre les abus dans l’Eglise catholique en 2010-2011 et après l’affaire Dutroux dans les années 1990.
Aux côtés de ces nouveaux enjeux liés à la possibilité de lever le secret, les CSIL-R amènent en outre ses participants à agir ensemble en élaborant un plan de suivi individualisé de la personne concernée par la concertation. Cette responsabilité en cascade dessine les lignes sécuritaires de futures actions sociales.
La question du temps de l’action sociale devient essentielle. La précocité de la détection initiée par les CSIL-R garantit-elle plus de sécurité que le travail social et éducatif à moyen et long terme ? Nous pensons que cet empressement à agir déstructure en profondeur les principes fondamentaux du champ de l’aide, de l’éducation et de la prévention, basés sur la confiance et le respect réciproque entre un bénéficiaire et un professionnel. Or, le travail social, par les possibilités d’agir qu’il permet, par le maintien et la restauration des droits qu’il vise participe lui aussi à la sécurité publique. De toutes et tous. Des adultes aux enfants. C’est pourquoi il est primordial que les modifications législatives réclamées par la lutte contre le terrorisme soient élaborées en respectant les missions et compétences de chacun des services concernés et par conséquent, leurs limites, notamment déontologiques.